Alexandre Bissonnette devra purger 25 ans de prison

Juridique

Alexandre Bissonnette, reconnu coupable de la tuerie de la Grande Mosquée de Québec, devra purger 25 ans de prison avant de pouvoir demander une libération conditionnelle. Dans sa décision transmise ce matin, une décision unanime, la Cour suprême du Canada invalide ainsi le cumul des peines. 

Le plus haut tribunal au pays suit ainsi la décision rendue par la Cour d'appel du Québec qui avait renversé la décision de la Cour supérieure du Québec. 

«L’horreur des crimes ne nie pas la proposition fondamentale que tous les êtres humains portent en eux la capacité de se réhabiliter et qu’en conséquence, les peines qui ne tiennent pas compte de cette qualité humaine vont à l’encontre des principes qui sous-tendent l’art. 12 de la Charte»​ - Extrait du jugement R. c. Bissonnette

En mars dernier, la Cour suprême du Canada avait entendu la cause sur la constitutionnalité de cette disposition du Code criminel ajoutée en 2011, sous le gouvernement conservateur de Stephen Harper. Cette disposition donnait la possibilité à des juges condamnant des personnes coupables de multiples meurtres d'imposer plusieurs périodes d'inadmissibilité de 25 ans à la libération conditionnelle, purgées consécutivement. 

Le plus haut tribunal au pays a toutefois tranché, dans un jugement fort attendu, que le cumul de ces tranches de 25 ans contrevient à l'article 12 de la Charte canadienne des droits et libertés protégeant contre tous traitements ou peines cruels et inusités. Cette invalidation est par ailleurs rétroactive, tout contrevenant ayant écopé de périodes d'inadmissibilités de 50 ans ou plus pourra donc demander réparation.

«Poussée à l'extrême, la disposition contestée autorise le tribunal à ordonner à un contrevenant de purger un temps d'épreuve qui dépasse l'espérance de vie de toute personne humaine, une peine dont l'absurdité est de nature à déconsidérer l'administration de la justice», peut-on lire dans la décision rédigée par le juge en chef Richard Wagner.

Rappel des faits 

Le 29 janvier 2017 avait eu lieu la tuerie de masse au Centre culturel islamique de Québec (CCIQ). Armé, Alexandre Bissonnette avait fait irruption à l’heure de la prière. Le bilan avait été de six morts et huit blessés, dont six graves. Il a plaidé coupable à 12 chefs d’accusation, dont six de meurtre au premier degré, mais avait contesté la sentence initiale avec succès en 2019.

Les victimes d'Alexandre Bissonnette sont six hommes ; Ibrahima Barry, Mamadou Tanou Barry, Khaled Belkacemi, Aboubaker Thabti, Abdelkrim Hassane et Azzedine Soufiane. 

En vertu du jugement d'aujourd'hui, Bissonnette pourra demander une libération conditionnelle en 2042. Il sera alors âgé de 52 ans. 

La communauté musulmane de Québec est déçue

«La page ne sera jamais tournée complètement», a lancé Mohamed Labidi lors d'un point de presse vendredi, quelques heures après que le jugement soit tombé. 

«La justice a préféré donner la chance à la réhabilitation d’un tueur plutôt que de considérer la souffrance des victimes qui risquent de croiser le tueur de leurs pères dans les rues de Québec dans plusieurs années», a mentionné Boufeldja Benabdallah.

«Cette décision ne prend pas en considération, à leur juste valeur, l’atrocité et le fléau des meurtres multiples, ainsi que l’aspect haineux, islamophobe et raciste du crime», a aussi mentionné la communauté du Centre culturel islamique de Québec.

Malgré la déception qu'a générée cet ultime chapitre judiciaire, la communauté désire désormais se «concentrer sur l'avenir» et a remercié au passage le Directeur des poursuites criminelles et pénales de les avoir soutenus tout au long du processus. 

(Julien Denis, avec l'information de Philippe Couture pour Noovo Info et de La Presse canadienne)